CHAPITRE IX

Avant que le monstre velu n'ait pu tirer, Kariven tendit le poing dans sa direction. Ses doigts serrés pressèrent la bague. Un faisceau de lumière d'une insoutenable intensité éclaira l'horrible visage du géant. Une indicible stupeur douloureuse crispa ses traits. En titubant, il lâcha la mitraillette et porta ses mains à ses yeux.

Michel Dormoy se précipita et, d'un croc-en-jambe, culbuta le Yétis qui tomba à la renverse en poussant une plainte. La statuette de bronze s'abattit à plusieurs reprises sur son crâne.

Le second géant fit volte-face, mais le rayon aveuglant balaya aussitôt ses prunelles rougeâtres.

Avec une surprenante rapidité, Kariven bondit, lui arracha son arme et, la faisant tournoyer comme une massue, en décocha un formidable coup sur la nuque du cerbère himalayen. Etourdi, le géant chancela. Sans lui accorder de répit, l'archéologue brandit à deux mains l'arme par le canon.

Un choc sourd. Un craquement d'os et « l'abominable homme des neiges » alla dans l'au-delà rejoindre son complice.

— Vite ! chuchota Kariven en passant à son cou la courroie de la mitraillette. Si nul ne découvre les cadavres, nous disposons encore de deux heures et demie avant la relève de la garde. As-tu trouvé les clés ?

— Non. Fouillons celui-ci...

Retournant le corps inerte, ils se mirent en devoir d'inspecter minutieusement ses poches. Au bout de quelques minutes, ils découvrirent, fixé sous le ceinturon, un rectangle métallique brillant à bords dentelés.

— C'est tout ce qu'il a ! pesta Dormoy. Son copain a le même truc caché dans son ceinturon. Serait-ce une plaque d'identité ?

Sans répondre, Kariven monta prestement les marches et, sous le perron du sanctuaire, examina la serrure, une bien curieuse serrure en vérité. Elle ne portait que deux minces fentes de dimension différente.

L'archéologue redescendit précipitamment :

— Va immédiatement prendre cette plaque sur l'autre Yétis, je m'occupe de celle-ci... Ces deux rectangles dentelés sont les « clés » de la porte monumentale. Celle-ci ne peut s'ouvrir sans ces deux « Sésames »... Puisque tu y es, parvint-il à plaisanter, emprunte-lui aussi sa torche électrique !

Une minute plus tard, les lourds vantaux de bronze tournaient silencieusement sur leurs gonds. Michel Dormoy repoussa péniblement les battants et glissa entre eux la statuette « assommoir ». De ce fait, si un éventuel mécanisme de sécurité entrait en action, la porte ne pourrait pas se refermer.

Ils marchèrent avec prudence. La torche, recouverte d'un mouchoir, ne laissait filtrer qu'une faible lumière.

Le sanctuaire sacré, où les fidèles n'étaient admis en masse que dans les grandes occasions, se composait d'une unique salle, mais quelle salle ! Longue de quarante mètres, large de vingt, son plafond était à peu près à vingt-cinq mètres de hauteur.

Au centre, sur un piédestal conique sculpté de divinités orientales, se dressait un Bouddha colossal. Sa face, aux yeux baissés, fendue d'un sourire indéfinissable, semblait contempler les intrus avec bonhomie. Le silence inquiétant des lieux et les circonstances présentes empêchaient les explorateurs de goûter la paix émanant du prophète jaune.

— Les plans ne peuvent se trouver que dans le corps du Bouddha, chuchota Kariven en promenant le faisceau de sa lampe sur l'imposante statue. Les idoles de ce genre sont fréquemment creuses ; cela permet à un bonze de s'y dissimuler. En parlant à travers un conduit acoustique, ses paroles semblent sortir de la bouche du Dieu, ce qui ne laisse pas d'impressionner profondément les crédules indigènes.

Ils contournèrent l'autel, où les Thibétains superstitieux déposaient leurs offrandes tout en faisant brûler des bâtonnets d'encens, et ils arrivèrent derrière le piédestal.

Habitué aux fouilles et connaissant les petites supercheries familières aux bonzes lamaïstes, Kariven eut tôt fait de découvrir, dans les blocs de pierres, certaines irrégularités insolites. Il passa ses mains sur les dalles, les palpa doucement et, bientôt, un déclic imperceptible se fit entendre. Un pan de mur d'un mètre carré pivota, démasquant une entrée dérobée.

Ils s'y engagèrent avec circonspection presque à quatre pattes, et se trouvèrent dans un réduit de cinq mètres carrés environ.

Comme l'avait prédit l'archéologue, dans le mur de face s'ouvrait un tuyau d'argile communiquant vraisemblablement avec la tête du Bouddha. C'est devant cet orifice que devait parler le prêtre. Ses paroles déformées par le tube acoustique donnaient aux fanatiques l'impression d'entendre la voix caverneuse du prophète.

Des cassettes, taillées à même les murs latéraux, abritaient plusieurs coffrets en matière plastique, sans serrure.

Kariven et Dormoy les examinèrent un à un, en replaçant certains et posant les autres sur le parquet. Ces derniers furent vidés de leur contenu. Des plans couverts de caractères inconnus — kotamdiens peut-être ? — voisinaient avec des « bleus » d'origine thibétaine.

Kariven, parmi ce fouillis, retira brusquement une liasse de grandes feuilles en matière plastique opaque. Sur la première était gravé le Serpent Ourobouros lové en cercle.

— Enfin ! soupira-t-il. Voici le procédé de fabrication du cercle extra-dimensionnel !

— Et voilà les plans du « Mur du Néant »... Tout au moins, je le pense, dit à son tour Michel Dormoy en montrant une série de feuilles reliées ensemble. L'une d'elle représentait, vue en coupe, une pièce en forme de U où ils reconnurent la table métallique supportant le graphoscope.

Les deux explorateurs firent main basse sur tous les plans qu'ils purent enfouir dans leur poches et s'apprêtèrent à sortir.

Michel Dormoy remarqua un tube brillant posé dans un coin du réduit. Il le prit, le retourna et parvint à ouvrir l'un des côtés. Le tube contenait un rouleau de carton souple.

— Une carte du Thibet, constata-t-il avec dédain après l'avoir déroulée.

Il allait la rejeter lorsque Kariven lui saisit le bras :

— Bon sang ! C'est une aubaine inestimable ! Regarde donc mieux cette carte... Ce grand cercle jaune en forme de Soleil marque l'emplacement de Bakrahna et celui-ci le monastère de Zack... Il y a une multitude de petits cercle désignant un grand nombre de villes ou villages disséminés dans tout le Thibet. Cela ne te dit rien ?

— Mais... serait-ce les emplacements des monastères abritant les révolutionnaires du Soleil d'Or ?

— Exactement. Cette carte indique tous les repaires, cantonnements, arsenaux et garnisons yétis sous la dépendance des Sept Sages de Bakrahna !

Le rouleau fut prestement enfoui dans la tunique de Michel Dormoy. Matelassés des précieux documents, les deux explorateurs quittèrent la statue creuse.

Par l'entrebâillement de la porte en bronze, ils observèrent la grande place déserte et sombre maintenant que la lune disparaissait derrière le sommet du cratère.

— Nous ne pouvons pas emporter ces mitraillettes, remarqua Michel Dormoy. Les Yétis en faction devant la lamaserie trouveraient bizarre que, sortis les mains vides, nous revenions armés jusqu'aux dents.

— Evidemment, cela n'est pas possible. Mais tu peux toujours en accrocher une sous ta tunique. En cas d'alerte, j'utiliserai ma bague. Cela te laissera le temps de sortir ton joujou.

Dormoy acquiesça et, ainsi équipés, ils reprirent le chemin de la lamaserie.

Les deux géants Himalayens, à leur approche, se cassèrent en deux en psalmodiant moultes bénédictions !

Au lieu de rejoindre leur chambre, les deux « Sages » se dirigèrent vers le sous-sol où s'enfonçaient les laboratoires.

Ils descendirent prudemment les nombreuses marches et s'arrêtèrent soudain, l'oreille tendue. En bas du couloir, des pas pesants résonnaient lugubrement.

— Un Yétis monte la garde à l'entrée du labo!... chuchota Kariven. Sors ta mitraillette et dissimule-la dans ton dos. Suis-moi de près... Si au moins je parlais correctement le thibétain ! pesta-t-il.

Les deux amis s'avancèrent silencieusement, l'un derrière l'autre, dans le couloir parcimonieusement éclairé. La tête inclinée sur la poitrine, ils obliquèrent à droite et aperçurent à cinq mètres devant eux le géant qui leur tournait le dos. Il s'apprêtait à faire demi-tour pour arpenter le couloir dans l'autre sens...

Michel Dormoy souleva sa tunique, sortit fébrilement la mitraillette et attendit.

Lorsque l'abominable homme des neiges — qui ne soupçonnait encore rien — se retourna, le faisceau fulgurant de la bague aveuglante le plongea dans la nuit. Il poussa un cri de douleur et chancela en portant les mains à son visage velu.

D'un croc-en-jambe, accompagné d'une poussée, Kariven le renversa. Avant qu'il n'ait touché terre, Michel Dormoy lui brisa le crâne avec la crosse de la mitraillette.

D'un bond, l'archéologue ouvrit la porte du laboratoire et s'arrêta net, frappé de surprise.

Gora Topki, une blouse blanche passée sur sa tunique écarlate, se tenait devant un appareil compliqué. Pendant qu'il travaillait à ses expériences, il avait entendu le cri du Yétis et le bruit de sa chute.

En voyant surgir ses deux captifs revêtus de tuniques et armés d'une mitraillette, son inquiétude fit place à la terreur. Ses yeux hagards parcoururent la pièce et il se précipita sur un tableau de commandes.

Une rafale de mitraillette tirée par Dormoy presque à bout portant lui fracassa le poignet alors qu'il allait enclencher un disjoncteur.

Gora Topki poussa un hurlement de douleur.

Kariven referma brutalement la porte et courut jusqu'au bouton mural commandant le mécanisme du cercle extra-dimensionnel.

Le serpent Ourobouros translucide s'illumina. Une vibration sonore emplit le laboratoire. La porte de la Dimension X était ouverte.

La lamaserie retentissait maintenant de cris et d'appels qui se mêlaient aux ordres gutturaux lancés par les Yétis de faction à l'entrée.

Une galopade qui se rapprochait parvint au sous-sol.

— Mike ! ordonna Kariven, attrape ce vieux citron et jette-le à travers le cercle. Vite !

Le vieux Sage, malgré son poignet ensanglanté, tenta de résister. Un uppercut au menton lui fit changer d'avis. Son corps inerte, soulevé par Michel Dormoy, fut lancé au milieu du cercle où il disparut instantanément.

— Aide-moi ! ordonna à nouveau Kariven en soulevant une table de deux mètres de long.

D'un bref coup d'oeil, l'archéologue évalua la distance et, après avoir mis la table en équilibre sur son plus petit côté, il la maintînt solidement.

— Vite, Mike, saute dans le cercle !

— Mais, toi ? demanda anxieusement Dormoy en entendant les coups violents frappés par les Yétis à la porte du laboratoire.

— Saute donc, te dis-je ! s'emporta Kariven.

Dormoy haussa les épaules et enjamba le cercle au sein duquel il s'évapora.

Kariven lâcha alors la table et bondit à travers le Serpent Ourobouros.

N'étant plus retenue, la longue table s'abattit et tomba sur le gros bouton mural qu'elle brisa. Le contact interrompu, le cercle extra-dimensionnel perdit aussitôt sa luminescence et cessa de vibrer. La porte menant à la Dimension X était fermée.

C'est donc dans un laboratoire vide que firent irruption les abominables hommes des neiges aux yeux injectés de sang par la fureur.

 

 

Lorsque Gora Topki revint à lui, Michel Dormoy et Kariven se tenaient à ses pieds. Des soldats de la garde kotamdienne, de faction devant « la porte de la terre », l'avaient accueilli, stupéfaits, à son arrivée brusquée sur Kotamdo.

Un soleil nettement orangé éclairait Gotha d'une étrange lumière. Ses rayons rehaussaient la teinte écarlate des tuniques (empruntées » par les deux courageux explorateurs.

Alertés par télévisionneur, le Major Bruce, Angelvin, Barbara Turner et la délicieuse Reine Luwhana arrivèrent à bord d'une sorte de limousine effilée, en matière transparente.

Lorsque les deux Terriens s'aperçurent que ce superbe véhicule ne possédait pas de roues et se déplaçait à vingt centimètres du sol, il en restèrent pantois d'étonnement.

Un système répulsif maintenait la limousine en l'air pendant qu'un moteur à réaction spécial la faisait avancer, ou plutôt, « voler » à très grande vitesse.

Kariven et Dormoy ne savaient plus à qui répondre. Dans la joie de les retrouver sains et saufs, leurs amis les inondaient de questions, tandis que les soldats de la garde conduisaient le vieux Thibétain à l'hôpital militaire.

Les deux nouveaux venus prirent place à bord de la voiture flottante qui les amena, avec une souplesse incroyable, jusqu'au palais de la Reine Luwhana. Kwantor, le Directeur du Centre de Recherches Scientifiques, les y attendait.

Luwhana, plus émue qu'elle n'eût voulu le laisser voir, regardait Jean Kariven avec une joie non dissimulée.

De son côté, l'archéologue n'était pas en reste et la couvait des yeux. Sa beauté fascinante l'envoûtait littéralement.

Dormoy s'entretenait avec ses compagnons retrouvés et leur contait les aventures qui l'avaient amené à Bakrahna.

Profitant de ce qu'il était seul, la jeune souveraine s'approcha de Kariven.

Celui-ci lui prit mes mains et, le cœur vibrant de plaisir, murmura :

— Je suis revenu, Luwhana...

— Je t'attendais..., Kary, répondit-elle simplement dans un délicieux sourire.

Leurs regards et la pression de leurs doigts semblaient mettre en contact l'âme de ces deux êtres.

En se tournant vers Kariven, Dormoy s'exclama :

Mais, pourquoi diable as-tu... (il eut une hésitation en voyant son ami qui, maintenant, serrait Luwhana dans ses bras)... amené Gora Topki avec nous ? acheva-t-il lentement, gêné d'avoir troublé cette idylle naissante.

A regret, Kariven et Luwhana interrompirent leur premier baiser.

L'archéologue haussa un sourcil, tambourina négligemment de ses doigts sur une matière plastique, puis, s'étant composé un air amusant et dégagé, répondit :

— Mais pour qu'il collabore avec les ingénieurs kotamdiens, voyons ! Ce vieux fou est le seul capable de réaliser rapidement un cercle extra-dimensionnel de grand modèle. Nous possédons évidemment les plans permettant sa construction. Toutefois, leur traduction demandera pas mal de temps, même si notre ami Angelvin, le distingué ethnographe, y consacre vingt heures par jour... D'autant plus, qu'il n'a pas que cela à faire, ironisa-t-il en jetant un clin d'oeil malicieux à la jeune Américaine.

— Et tu crois qu'il acceptera d'aider les techniciens de Gotha pour forger l'arme de sa propre défaite ? souligna Dormoy.

— Non seulement je le crois, mais j'en suis sûr. Gora Topki est un Jaune, fidèle au bouddhisme malgré sa vaste érudition et ses railleries envers ses frères superstitieux. Qu'en pense l'ethnographe ? demanda-t-il en se tournant vers Angelvin.

— Je suis de ton avis, Kary. Si nous menaçons le vieux Thibétain de le garder prisonnier à vie sur Kotamdo — donc, hors du plan terrestre où règne Bouddha, — il fera tout ce que nous voudrons. Pour lui, mourir dans un univers inaccessible à l'omnipotence de son Dieu, ce serait la perdition de son âme. Il ne voudra pas cela et préférera tout plutôt que de ne pas bénéficier des sécurités morales qu'assurent les rites du Bardo Thödol.

— Nous le tenons, ce révolutionnaire ! ricana le Major Bruce.

 

 

Dormoy et Kariven, en présence de tous leurs amis, commencèrent le dépouillement de leur volumineux butin. Un garde kotamdien introduisit bientôt Gora Topki dans les somptueux appartements de la Reine Luwhana. Les traits tirés, le vieillard fit son entrée, le bras droit entouré de pansements et soutenu par une bande de tissu pendant sur sa poitrine.

A la vue des deux Blancs qui s'étaient joués de lui, une lueur de haine farouche brilla dans son regard.

— Ainsi, Kariven, vous m'avez trompé ! rugit-il. J'aurais dû vous tuer au lieu de m'apitoyer sur votre soi-disant roman d'amour. Vos divagations, Jany, votre fiancée que vous vouliez à tout prix rejoindre, tout cela n'était que ruse de guerre !

— A la guerre comme à la guerre, railla l'archéologue, savourant sa victoire.

— Ne vous faite pas d'illusions ! s'emporta de plus belle le vieux Thibétain. Je suis en votre pouvoir, je le reconnais. Cependant, mes six frères, les grands Sages de Bakrahna, eux, sont en liberté. Ils poursuivront nos plans et ne tarderont pas à lâcher les armées de Yétis sur le monde. Nos fusées ionosphériques bombarderont vos capitales. Des millions de Blancs périront sous les décombres et les survivants nous supplieront de faire cesser le carnage, préférant l'esclavage sous le joug de l'Invincible Soleil d'Or, plutôt que la mort à brève échéance. Vous êtes peut-être en sécurité, ici, dans la Dimension N, mais vous ne pouvez plus rien pour vos semblables de la Terre. Si vous essayez de pénétrer dans Bakra na par l'unique chemin du cercle extra-dimensionnel, vous serez massacrés par les Yétis qui doivent veiller dans mon laboratoire. Vous êtes libres, en effet, mais prisonniers de Kotamdo. Jamais vous ne reverrez la Terre !

— Ni vous non plus, si vous ne nous obéisses pas ! riposta Kariven avec une douceur trompeuse.

Flairant un piège, le Sage Thibétain plissa ses yeux bridés.

— Je n'ai d'ordre à recevoir de personne, d : t-il crânement. Je ne crains pas la torture. Nous autres. Jaunes, sommes moins sensibles à la douleur que vous ne pourriez le penser.

— Ne vous tourmentez pas à ce sujet, affirma Kariven. Nous ne sommes pas des tortionnaires et nous n'agissons pas comme les pirate de Kuong Ling Tung qui mutilent atrocement leurs prisonniers. Les tortures que nous pouvons vous infliger sont purement morales.. Contrairement à ce que vous croyez, nous allons retourner sur la Terre, mais sans passer par Bakrahna. Nous vivrons à nouveau dans nos pays civilisés, avec ceux que vous vouliez asservir. Mais vous, vous resterez prisonnier à Gotha jusqu'à la fin de vos jours, Vous mourrez et serez enterré ici, dans cet univers différent du vôtre et où Bouddha, votre Dieu, n'a aucune relation !

Le teint jaune de Gora Topki devint olivâtre. Ses yeux s'agrandirent d'horreur et ses lèvres s'agitèrent à plusieurs reprises avant de pouvoir balbutier :

— Vous... vous ne pouvez pas retourner là-bas... sur la Terre.

— Nous le pouvons... et VOUS resterez ici !

— Non ! supplia-t-il en tombant à genoux... Vous ne ferez pas ça ! Je ne veux pas mourir sans que mon âme profite des rites du Bardo Thödol ([13]). Je vous obéirai, mais ne me laissez pas ici !

— Parfait, déclara l'archéologue. Dans ce cas, asseyez-vous et répondez à nos questions.

Docilement, le vieux Thibétain (craignant pour le repos de son âme !) prit place à la table sur laquelle il reconnut, avec effarement, les documents volés aux Kotamdiens par ses sbires ainsi que les plans du cercle extra-dimensionnel.

— Vous avez violé le sanctuaire de Bouddha ! s'indigna-t-il.

— Oui, répondit posément Michel Dormoy qui, dans un sourire ironique, ajouta : mais nous n'avons rien cassé !

L'entrée de quatre ingénieurs kotamdiens appelés par Kwantor empêcha le Jaune de proférer les malédictions qu'il s'apprêtait à lancer sur les Blancs sacrilèges.

Les ingénieurs prirent place autour du prisonnier et attendirent ses explications.

— Voici les techniciens que vous allez guider, annonça Kariven à Gora Topki. Sous le contrôle d'Angelvin qui lit et comprend le thibétain, vous leur montrerez la manière d'interpréter ce plan afin de construire un cercle extra-dimensionnel dans un temps record.

Vaincu, le vieillard inclina la tête.

— Plus tard, poursuivit l'archéologue, vous les aiderez à réaliser le fantastique « mur du néant ». Nous vous ramènerons ensuite sur la Terre, grâce au cercle auquel vous allez travailler, et vous enseignerez de nouveau les processus de fabrication de tous ces secrets à nos propres savants. Si vous essayez de gagner du temps ou tentez de saboter les appareils, vous serez exécuté et votre corps restera à jamais sur Kotamdo. Sommes-nous bien d'accord ?

De nouveau, le Jaune opina du chef.

Dépliant la carte du Thibet prise dans le sanctuaire, Dormoy demanda :

— Est-ce bien la carte qui indique vos places fortes, vos monastères truqués dissimulant des laboratoires ainsi que les garnisons de Yétis ?

— Oui, avoua le prisonnier.

— Que représentent ces lignes rouges reliant Bakrahna à toutes les autres villes ou localités cerclées de jaune.

Gora Topki hésita, puis répondit :

— Ce sont des... des lignes... des réseaux électriques transportant l'énergie à travers le Thibet.

Kariven eut une moue sceptique :

— Peu importe. Pour l'instant, ne perdons pas de temps. Allez immédiatement dans le laboratoire de Gotha et mettez-vous au travail. Le cercle extra-dimensionnel doit être prêt d'ici quatre jours, cinq au plus.

Les ingénieurs et Angelvin — que ne voulut pas quitter Barbara ! — s'en allèrent en emmenant le vieux physicien.

— Quel est ton plan, Kary ? demanda Michel Dormoy.

— Voici : il faut tout d'abord construire une cercle extra-dimensionnel géant...

 

 

Dans l'après-midi du cinquième jour, une gigantesque armature de métal, haute de cent mètres,, large de vingt, se dressait au sommet d'une montagne, à trente-cinq kilomètres de Gotha.

Une trentaine de spécialistes, sous les ordres des quatre ingénieurs initiés par Gora Topki, s'affairaient au pied de la construction. A travers les armatures de soutènement on pouvait voir un monumental cercle translucide que les rayons du soleil irisaient.

Un bâtiment démontable, rapidement installé, abritait les délicats mécanismes qui actionnaient ce titanesque cercle extra-dimensionnel presque achevé.

Gora Topki contemplait son invention avec une admiration mêlée de crainte. Pourquoi donc lui avait-on ordonné de multiplier par cinquante les cotes de son cercle installé à Bakrahna ? A quoi était destinée cette formidable copie du serpent Ourobouros ?

— Ne rêvez pas, Gora Topki, et vérifiez les organes moteurs pour savoir si nous pouvons démonter sans crainte l'armature métallique, ordonna Robert Angelvin.

Accompagné des quatre ingénieurs, il venait se rendre compte des derniers préparatifs précédant les essais.

 

 

Pendant ce temps, une agitation inaccoutumée régnait à Bakrahna. Après la disparition du Sage Gora Topki, les six autres chefs spirituels du Thibet avaient mis tout en œuvre pour devancer la date du soulèvement asiatique contre les Occidentaux.

L'Armée Rouge, cantonnée dans les provinces asiates sous les ordres du Général Mikaïlovitz Brodzky, se tenait prête à attaquer. Le Général imaginait déjà la victoire prochaine qui lui procurerait, comme promis par les Thibétains, le poste de Chef du Soviet Suprême détenu maintenant par son rival.

Les hordes chinoises de Kuong Ling Tung piétinaient d'impatience devant les frontières indochinoises, coréennes et birmanes.

Quant aux sept cent mille Yétis dissimulés clans les régions désertiques, ils scrutaient le ciel en quête des fusées ionosphériques qui devaient, après les premiers bombardements, les parachuter en commandos sur les pays attaqués.

Tous les rouages du fantastique mouvement révolutionnaire « Soleil d'Or », minutieusement entretenus, n'attendaient que le signal pour faire passer le Péril jaune du cauchemar à la réalité.

Lorsque l'heure sonnerait, des troupes asiates puissamment armées, modernes hordes de Gengis Khan, déferleraient sur l'Europe, l'Angleterre et les U.S.A. précédemment ravagés par les bombes.

Tout autour de Bakrahna, entre la Cité et les parois du cratère, s'étendait un espace circulaire d'un kilomètre de large environ. Sur cet aérodrome de ceinture se dressaient des milliers de fusées ionosphériques pouvant transporter, en plus de leur cargaison de bombes, trois cents géants himalayens.

Dans la lamaserie, transformée en G.Q.G, des forces armées révolutionnaires de l'Invincible Soleil d'Or, les Six Sages du Thibet contrôlaient, par télévisionneurs, les diverses activités de leur énorme machine guerrière.

Dans quelques heures, à la tombée de la nuit, l'ordre d'attaquer serait lancé !

 

*

 

Penché sur l'ensemble-moteur qui commandait le gigantesque cercle extra-dimensionnel, Gora Topki abaissa une manette.

Le monstrueux serpent Ourobouros devint étincelant. Sa lueur propre éclipsa celle du soleil et une onde sonore fit vibrer l'air, tandis que les poutres métalliques de la charpente intérieure qui traversaient le cercle disparaissaient.

— L'essai est concluant, dit le Thibétain en relevant la commande.

Le cercle, redevenu transparent, perdit sa luminescence. Les vibrations cessèrent et les poutres transversales réapparurent.

Angelvin ordonna aux techniciens spécialisés de démonter rapidement l'armature. Il grimpa ensuite, en compagnie du vieux Thibétain et de Kwantor, dans une de ces puissantes limousines flottantes. L'engin super-aérodynamique se souleva légèrement et partit en vrombissant.

Arrivé à Gotha, l'ethnographe s'engouffra dans le Palais Royal où ses amis l'attendaient avec impatience.

— Ça y est ! s'écria-t-il joyeusement en guise de bonjour. Le cercle géant fonctionne ! Dans une heure, la nouvelle « Porte de la Terre » sera ouverte ! Préparons-nous à tenter notre dernier « coup de main », comme dirait Dormoy. Si nous arrivons trop tard, la race blanche est fichue !

Les quatre explorateurs, accompagnés de la Reine Luwhana, sortirent du palais et prirent place dans la limousine flottante où étaient restés Kwantor et Gora Topki.

En quelques minutes, ils furent rendus à l'aérogare de Gotha. Sur les immenses pistes d'envol s'alignaient des fusées ionosphériques identiques à celles qu'avaient construites les Thibétains.

Nos amis grimpèrent dans l'un de ces engins métalliques, et l'écoutille étanche se referma doucement sur eux. Ils s'installèrent confortablement dans des sièges souples, d'où ils purent contempler, par les hublots latéraux, l'aérodrome hérissé d'aéronefs. Larges de vingt mètres à leur base, hauts de soixante-quinze mètres, ces engins desservaient les trois continents de Kotamdo.

La fusée se mit à cracher des flammes par ses tuyères caudales. Dans un vrombissement étourdissant, elle se souleva, lentement d'abord, puis de plus en plus vite, et fonça vers les nues. Hurlant comme une escadrille de vampires faisant du rase-motte, l'aéronef ne tarda pas à survoler la montagne au sommet de laquelle se dressait le cercle extra-dimensionnel colossal, immobile dans le vide.

L'armature métallique, entièrement démontée, s'entassait en amoncellements réguliers sur les rochers environnants.

Par télévisionneur, le pilote de la fusée transmit les ordres de sa royale passagère.

Dans le poste de pilotage, et aux côtés de Kariven, Luwhana se pencha sur l'écran télévisionneur :

— Mettez le contact ouvrant la (Porte de la Terre » et attendez. Si dans une heure nous ne sommes pas revenus, lancez une escadrille sur nos traces d'après les données communiquées par Kariven... Terminé.

Tous deux retournèrent à leurs places, côte à côte. L'archéologue décrocha le micro fixé au dossier du siège précédant le sien et ordonna :

— Partez à vitesse réduite et traversez le cercle extra-dimensionnel. Cette « Porte » franchie, prenez immédiatement de l'altitude et grimpez en flèche.

Lentement, la fusée décrivit un tour complet au-dessus de la montagne, puis, résolument, mit le cap sur le monumental « Serpent Ourobouros » qui venait de s'illuminer intensément. L'aéronef s'engagea dans l'axe du cercle aux extraordinaires propriétés.

Par les hublots bombés vers l'extérieur, nos amis virent disparaître progressivement le mât de radar et le nez de la fusée. Ensuite, ils ne distinguèrent plus rien car la partie de l'engin qu'ils occupaient franchissait à son tour l'étrange « Porte de la Terre ».

Soudain, les explorateurs du néant furent plongés clans l'obscurité. La nuit régnait sur cet hémisphère de la Terre.

S'adressant à Gora Topki, visiblement effondré par sa défaite totale, Kariven lui enjoignit :

— A vous, maintenant. Où sommes-nous ?

Le Jaune scruta la région montagneuse survolée, puis, quand ses yeux furent un peu plus habitués à l'obscurité, il répondit :

— Nous devons être aux environs des Monts Bassoudoun-Oula. Oui... je reconnais maintenant la « Dent du Dragon », au loin, dans la chaîne des Monts Soum-Amne-Là. Mettez le cap sur l'Ouest et vous apercevrez... Bakrahna... Vous n'irez pas loin, ajouta-t-il, sarcastique. Nos radars auront tôt fait de vous déceler ! L'aéronef sera abattu et nous mourrons tous ensemble... si c'est cela que vous cherchez !

Haussant les épaules, Kariven reprit le micro et communiqua avec le pilote :

— Mettez en marche le dispositif de brouillage électronique. Nous allons entrer dans la zone contrôlée par les radars ennemis.

Cinq minutes plus tard, et sans incident, la fusée survolait l'énorme cratère où se terrait Bakrahna. Sans plus se cacher, les Thibétains avaient allumé de puissants projecteurs qui, du sommet du cirque, éclairaient la piste circulaire où se dressaient les milliers de fusées chargées de bombes. Les colonnes de Yétis, sans arrêt, s'engouffraient dans les carlingues avec une précipitation qui frisait l'hystérie. Ils semblaient avoir soif de carnage !

Un jet de flammes pourpres sortait déjà à la base de plusieurs engins. La première vague meurtrière allait décoller.

— Lâchez la bombe ! ordonna vivement Kariven.

La fusée monta en flèche et, dans un miaulement terrifiant, piqua sur les projecteurs qui balisaient le terrain ceinturant Bakrahna.

— Non ! hurla le vieux Gora Topki en se précipitant vers le poste de pilotage.

Michel Dormoy, dépliant brusquement sa jambe, la mit en travers du passage pratiqué entre les deux rangées de sièges ; le vieillard larmoyant trébucha et s'affala sur le tapis recouvrant le parquet métallique.

Soulevant le Jaune, Dormoy le coinça alors contre son siège en lui tordant le poignet non blessé.

L'aéronef, en passant au-dessus de l'antique cité, largua sa bombe-fusée à rayons désintégrateurs.

Cette bombe, dotée d'un système de propulsion autonome, contenait dans son cône avant un émetteur de rayons qui désintégraient la matière. Arrivée au sol, elle creusait automatiquement un puits qui prolongeait sa chute sous terre jusqu'à une profondeur déterminée. Cette profondeur atteinte, la bombe atomique faisait explosion en causant d'inimaginables ravages.

La fusée kotamdienne prit rapidement de l'altitude et, à cinq mille mètres plafonna au point fixe en orientant ses tuyères latérales.

Penchés sur un écran télévisionneur d'approche, les Terriens, la Reine Luwhana et le pilote, attendirent, le cœur battant.

Tout à coup, la couronne des projecteurs s'éteignit et la cité maudite, parut soulevée par un terrifiant champignon de feu zébré d'éclairs violacés. Bakrahna sembla monter d'une pièce dans le ciel, puis se morcela graduellement.

L'aéronef dut filer en flèche à vingt mille kilomètres-heure afin d'éviter d'être pris dans cette fantastique projection de matériaux, de carcasses de fusées et de cadavres réduits en cendres.

Même à cent quatre-vingt-dix kilomètres d'altitude, l'effrayante lueur du bombardement titanesque était parfaitement visible. On eût dit une monstrueuse colonne incandescente et crépitante, nimbée de rose.

Le paysage qui s'étendait sous la fusée était nettement visible sur plusieurs centaines de kilomètres. En divers endroits du Thibet, des points brillants apparurent. En une seconde, ils se métamorphosèrent en auréoles purpurines grandissantes.

— Qu'est-ce que c'est ? Que se passe-t-il ? demanda Kariven.

Effondré sur le siège où Dormoy le plaquait, le front collé au hublot, Gora Topki articula :

— Ce sont nos arsenaux, nos monastères-laboratoire ? et nos diverses garnisons qui, reliés à un dispositif commandé par Bakrahna, viennent de sauter ! Ces lignes rouges, que vous aviez remarquées sur la carte volée dans notre sanctuaire, n'étaient pas des réseaux électriques transportant l'énergie, mais plutôt des télécommandes destinées à faire disparaître d'un seul coup, le cas échéant, toute trace des places fortes occupées par l'In... (Gora Topki n'osa pas dire l'Invincible). :. par le Soleil d'Or. En détruisant Bakrahna, vous avez déclenché le dispositif destructeur...

— Comme c'est dommage ! s'apitoya faussement Dormoy en grimaçant un moue chagrine.

La fusée redescendit lentement et nos amis, très surpris, constatèrent qu'à la place de Bakrahna s'ouvrait un cône volcanique en pleine activité. Des torrents de lave en ignition déferlaient sur les flancs du cratère au sein duquel, dix minutes auparavant, se dressait la cité maudite qui avait voulu asservir le monde. La bombe spéciale, en explosant à trente kilomètres sous terre, avait ébranlé les couches sous-jacentes de l'écorce planétaire. Sa prodigieuse puissance avait produit dans la croûte terrestre une faille localisée sous le Thibet central. Par cette faille s'engouffraient les gaz souterrains et le magma visqueux comprimés dans les entrailles de la Terre. Ceci provoqua de violents soubresauts telluriques qui réveillèrent le volcan éteint où gîtait Bakrahna.

En survolant à basse altitude la plaine environnante, illuminée par le cône rougeoyant de lave, les Terriens découvrirent les débris des huit quadrimoteurs abattus par les Jaunes. Près (Je cinq cents parachutistes britanniques reposaient là, dans le désert. Le sable, soulevé en nuages tourbillonnants par la mousson naissante, commençait à les ensevelir.

— Tu es fier de ton travail ! gronda Dormoy en apercevant un rictus sardonique sur les lèvres de Gora Topki.

Le Jaune tourna la tête vers le géophysicien et, en serrant les dents, vitupéra :

— J'aurais voulu exterminer la race blanche !

Ne pouvant plus se contenir, Dormoy empoigna le vil criminel.

Kariven fit un signe à son ami et ordonna au pilote d'ouvrir une écoutille.

Blême de colère devant le cynisme du satanique illuminé, Dormoy rugit :

— Va rejoindre tes victimes innocentes et tes espoirs insensés, Niakoué de malheur !

Précipité dans le vide, Gora Topki poussa un long cri de terreur qui s'affaiblit rapidement au cours de sa chute.

Le fanatique alla payer ses crimes sur les rochers mêmes où le commando parachutiste avait trouvé la mort.

La fusée décrivit un looping et reprit le chemin du retour.

La « Porte de la Terre », convenablement balisée (par les ingénieurs kotamdiens sortis de la Dimension X pour la circonstance) fut rapidement franchie.

Lorsque l'aéronef se posa sur l'aérodrome de Gotha, des Kotamdiens, par milliers, l'attendaient, avides de nouvelles. Au premier rang, les Terriens reconnurent avec joie leurs « compatriotes » : le professeur Bâtes, le docteur Stoker et tous les membres des expéditions disparues. Ces derniers, quand ils eurent appris qu'un espoir de revoir la Terre était permis, s'empressèrent de quitter le satellite Ongbo pour rallier Kotamdo. Ils voulaient revoir leur patrie afin de rassurer leurs proches. Ceux d'entre eux qui s'étaient établis dans la Dimension X et qui s'y trouvaient heureux, se contenteraient de faire un petit voyage chez les « hommes » avant de revenir dans leur planète d'adoption.

Les quatre explorateurs, non sans émotion, prirent congé de leurs amis « extraterrestres ». La fusée qui devait les reconduire à leur monde d'origine était prête à décoller.

Toute à la joie du départ, Barbara se pendit au cou de Robert Angelvin et faillit l'étouffer sous ses baisers.

L'élu de son cœur ne demeura pas en reste et les lui rendit avec un plaisir évident.

Kariven et Luwhana qui, pendant un moment, avaient été séparés, marchèrent l'un vers l'autre.

La jeune souveraine, coiffée du diadème en or incrusté de pierreries, s'avançait lentement. Ses yeux fascinants brillaient étrangement. Sa démarche souple, presque féline, faisait onduler le tissu argenté qui pendait à sa ceinture et heurtait mollement ses jambes admirables. Le soleil orangé qui baignait son corps de déesse mettait en valeur sa chaude carnation.

Kariven la prit dans ses bras. Ils échangèrent un long baiser.

— Je reviendrai, Luwhana chérie, murmura-t-il.

— Je t'attendrai, répondit simplement la merveilleuse beauté en se serrant contre lui. La (Porte de la Terre » est maintenant ouverte, pour toi et pour tes frères Terriens. Rien, désormais, ne pourra plus nous séparer...

 

FIN